mercredi 7 décembre 2005

À Jila Izadi

Note : Cette lettre fut rédigée il y a quelque temps, quand je venais d'apprendre qu'une Iranienne de 13 ans avait été condamnée à la lapidation par un tribunal à Marivan pour avoir été violée par son frère de 15 ans... Très chère Jila Izadi, Je vis sur une terre à l'autre bout du monde, dans un pays où les gens ne mangent pas tous trois fois par jour, mais où ils n'ont pas à craindre d'être torturés ou lapidés pour avoir transgressé la loi; un monde où la liberté n'est pour certains que le droit de faire n'importe quoi n'importe quand, mais dans lequel on ne tolère guère l'inacceptable sordidité que tu subis; une nation où tout le monde n'est pas toujours d'accord, mais où l'on s'affronte en agitant des pancartes et en confrontant des idées, presque tout le temps sans violence. Nos peurs ? Manquer d'argent, ne pas s'accomplir, être malade, mourir et voir ceux qu'on aime mourir. Des peurs légitimes, certes, mais jamais au grand jamais la peur d'être arrêté en plein jour, cagoulé, traîné sur des dalles froides, humides, pleines de sueur et de peur, enfermé dans une pièce sombre sans lumière, sans droit de parole, sans espoir. Jamais la peur d'être exposé devant une meute de chiens armés de pierres qui n'ont jamais péché; jamais la crainte de sentir les premières pierres qui ouvrent le crâne, cassent les dents, défoncent les os, broient la chair; jamais l'horreur d'espérer qu'une de ces pierres touche la tempe pour mettre fin à ce supplice de charognards. Tu sais quoi ? Le pire c'est que ce ne sont que des hommes qui ont inventé toutes ces règles qui ne servent qu'à asservir ou à soulager les angoisses de vivre sans réponse. Autrefois, dans mon monde, on brûlait vif des humains pour la gloire de cette utopie. Aujourd'hui, je ne risque plus le bûcher pour un mythe, mais toi oui : on te massacrera pour la gloire d'un dieu qui n'existe pas. Et si je me trompe, si d'une quelconque façon il arrivait qu'un grand barbu soit responsable de tout cela, je te jure qu'à ma mort j'irai lui cracher au visage en ton nom et le mien! Soit forte, il ne te reste que cela. Nous sommes quelques-uns qui continuons de nous battre pour un monde de véritable liberté. Paix.

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