vendredi 25 novembre 2005

Quand les hyènes rient

Quand ils ont rendu obligatoire le port de la ceinture en auto, j’ai dit « soyons vigilants ». On a souri poliment. Quand ils ont forcé le port du casque à vélo, j’ai dit « attention ». On a ri de moi. Quand ils ont interdit la cigarette partout, j’ai dit « danger ». On a rigolé en pointant mes cigarettes. Ils s’apprêtent à légiférer sur les parfums, justifiant leur intolérance par le fait que ça dérange…Ils sont sur le point de réglementer la planche à neige, parce qu’il y a trop d’accidents… Une étude française parle de l’alcool comme d’une « drogue » « pousse au crime » qu’il faut bannir lentement en faisant d’« une lutte contre l’alcoolisme une grande cause nationale »… Les hyènes riront encore. Jusqu’à ce qu’on leur interdise de rire. Et je n’aurai même pas l’occasion de rire à mon tour. __________________________________________________ Voici un petit texte qui n’est pas de moi, mais que j’endosse à 100 % ! « On peut imaginer deux sortes de monde que nous léguerons à nos enfants. Dans l’un de ces mondes, les gens craignent tout et leur ombre, mais à l'exception de l'État, lequel enserre pour leur propre bien dans la "tyrannie administrative" que Tocqueville avait prévue. C’est un monde doux et calme, mais morne, sans saveur, sans fumée et sans odeur, où les produits sont tous emballés de la même manière, où des avertissements et interdits de l'autorité figurent partout. Dans la novlangue de la rectitude politique, on n'y parle plus de flirt mais de harcèlement sexuel, plus de vin mais d'alcoolisme, plus de tabac mais de tabagisme, plus de jeu mais de risque. L'autre monde se situe aux antipodes : c'en est un de diversité, de couleurs, de liberté, de responsabilités, où chaque individu vit sa vie comme il l'entend, en assumant le risque de ses plaisirs et l'angoisse de sa mort. À la place de dispositifs qui administrent de la nicotine, de la caféine ou de l'éthanol à des ressources humaines remplissant leurs fonctions sociales, on y voit des gens qui fument, qui sirotent du café noir et qui boivent du vin de Bordeaux. Un dénominateur commun unit ces deux mondes : le taux de mortalité y est également de 100%. Mais les individus qui meurent ne sont pas les mêmes : dans le premier cas, ce sont des esclaves ; dans le second, des hommes libres. », p. 98-99. Pierre Lemieux, Tabac et liberté. L’État comme problème de santé publique, Montréal, Varia (Coll. « Essais et Polémiques »), p. 98-99.

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