Le soir même des élections, quand la tendance est apparue,
ils ont annoncé la mort du mouvement souverainiste. La voix tremblante et fébrile,
d’un élan consensuel coutumier, les fédéralistes de père en fils, les nouveaux
anti-sécessionnistes iPhone en main, les gérants de caisse populaire à
calculette, les animateurs de radio redondants et les journalistes à gage s’en
sont donné à cœur joie. Et ils ont continué depuis. Si bien qu’on comprend que
ce sera leur nouveau leitmotiv : on a remplacé la peur par l’oracle
morbide. C’est rassurant, on reste dans l’intimidation cléricale classique.
Ce qui étonne dans cette condamnation funèbre, c’est que, récemment, un sondage CROP mentionnait que 34 % des Québécois avaient répondu « oui »
à la question : « Si un référendum avait lieu aujourd'hui vous
demandant si vous voulez que le Québec devienne un pays souverain, voteriez-vous
Oui ou voteriez-vous Non ? ». 34 % n’est pas une majorité, soit, mais la
population québécoise étant estimée à un peu plus de 8 millions, c’est tout de
même plus de 2 millions de personnes qui sont disparues le soir du 7 avril.
Étrange non ?
On sait maintenant tristement qu’on peut égarer un Boeing de 600 000
livres comme on perd son dentier sur sa table de nuit et là, on nous apprend que
2 millions de souverainistes peuvent disparaître en un soir. Même David Copperfield
et Harry Houdini réunis n’auraient pu faire mieux.
Et pourtant, je doute.
Parce que depuis 1991 le Québec a toujours fait
élire des partis d’opposition au fédéral, que ce soit le Bloc québécois ou le
NPD, deux partis dont les programmes s’opposent à ceux des Conservateurs ou des
Libéraux, qui sont populaires dans le ROC.
Parce que, justement, les Québécois sont différents
des Canadiens.
Parce que notre langue, notre mentalité, nos
valeurs, nos allégeances, nos croyances sont différentes de celles du ROC, quand ce n’est pas diamétralement opposées.
Parce que nos ancêtres ont été conquis et qu'un peuple conquis, même soumis, garde toujours un flot de liberté et d'autonomie dans son sang.
Parce qu’on a annoncé la mort du projet souverainiste après le référendum de 1980, après celui de 1995, après la défaite péquiste de 2007, après la raclée reçue par le Bloc québécois en 2011.
Enfin, je doute parce que le désir de se tenir debout, l'envie d'être maître chez soi et la fierté de sa différence sont tributaires d’une force qui a
des racines profondes et indéracinables, aussi vieilles et solides que le fait français en Amérique du Nord.
Un jour, la peur ne sera plus un argument valable. Ce jour-là, la fierté, la force et le désir de liberté la feront taire, car la souveraineté québécoise est un phénix, n’en déplaise aux
fédéralistes de tout acabit.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire