mardi 7 mars 2006

Vivre en cage

Quand j'étais petit, mes parents m’amenaient parfois au zoo. D’aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais ressenti de bonheur lors de ces sorties. Je me rappelle très bien, je devais avoir à peine 6 ou 7 ans, que le spectacle de la nature condamnée à n’être plus qu’un morbide arrangement carcéral me remplissait d’un malaise profond, qu’aujourd’hui encore je ne m’explique pas parfaitement. Était-ce le fait de voir cet ours faire inlassablement un pas en avant, un pas en arrière, comme pour témoigner de l’étroitesse toujours grandissante de son esprit qui suivait l’enfermement de son corps ? Était-ce parce que la cage vitrée des singes sentait la merde, que la vitre était couverte d’excréments, ou que le chef des singes avait des « bobos » purulents sur le corps à force de se frotter sur des matières qu’on ne retrouve pas dans son environnement naturel ? Était-ce parce que la lassitude avec laquelle les animaux allaient chercher leur nourriture généreusement octroyée par les employés blasés exhibait clairement l’aspect pervers de cette « qualité de vie » artificielle qui serait supposée être mieux que le difficile et périlleux état naturel ? À ce sujet, je me rappelle un commentaire de mon vétérinaire félin, il y a quelques années. Comme mes enfants voulaient avoir un chat et que j’étais allergique, j’ai fait un compromis : nous aurions un chat qui vivrait à l’extérieur et qui aurait sa place à l’abri dans une petite verrière fermée, mais non chauffée. Un jour que je parlais à mon vétérinaire de mon appréhension pour mon chat alors que l’hiver arrivait, il me dit ceci : si j’étais un chat, je préférerais de loin subir la neige et le froid pour quelques mois avec mes griffes, mes hormones et mes escapades animales plutôt que le velours pénitentiaire d’une maison douze mois par année avec pour seul défi de ne pas me faire écraser par les grosses fesses de ma maîtresse…! Moi de même, je préfère vivre affranchi avec les risques de la liberté plutôt que prisonnier dans la lourdeur d’une sécurité factice. C’est pourquoi je trouve le zoo absurde et pathétique... ainsi que la vie bourgeoise.

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