dimanche 7 mai 2006

Le foie gras et moi

À partir du 1er septembre 2006, il ne sera plus possible de manger du pâté de foie à Chicago. Les restaurants qui continueront à en servir après cette date-butoir devront payer une amende quotidienne variant entre 250 et 500 $... Ce qui a motivé cette réglementation ? La violence faite aux canards et aux oies pour produire le subtil aliment. Il faut le reconnaître, la procédure n’a rien d’une sinécure pour Daffy et ses amis. C’est qu’un bon pâté de foie nécessite une crise royale du précieux organe. Or, comme les animaux ne sont pas aussi goinfres que nous, il n’est pas dans leur nature de s’empâter à en crever. La solution à ce dérangeant équilibre de la nature est de gaver l’animal de nourriture en la lui propulsant dans la gorge avec un tuyau. Ça ne doit pas être sensuel, en effet. Prendrai-je la position du Lotus pour applaudir ou serrerai-je les poings en criant "Laissez-nous vivre !" ? C’est la double contrainte : j'adore le pâté de foie, même si je trouve cruel le procédé de production, comme je rafole du filet mignon, des ailes de poulet et du bacon, qui, on le sait, ne poussent pas dans les arbres ni ne sont produits par des membres de la société protectrice des animaux. Il suffit de visiter une porcherie ou une étable à grande production pour supprimer toute bonne conscience qui subsisterait en déambulant dans le rayon sanglant de la boucherie du supermarché. Au fait, croyez-le ou non, j’ai confirmé auprès de mon boucher, la couleur rouge, ça a l’air que c’est du sang. Conclusion partielle : manger de la viande, c’est consommer de la chair cadavérique, la plupart du temps prélevée sur un animal qui est non seulement mort dans un acte de violence inouï, mais qui par surcroit a vécu son existence dans des conditions de vie on ne peut plus extrêmes. En manger en le sachant (comme je le fais), ce n’est que continuer à faire semblant que tout ça n’est pas si pire, comme nous sommes habitués à le faire tout le temps et pour tout. Faire semblant. Bah ! Bof ! Et puis ! So what ! Ben coudonc ! Tant pis ! Si votre conscience ne laisse pas glisser, il faudra voir à condamner toute consommation de ces produits bientôt. Personnellement, tout en digérant un Finesse extra pâté de foie, submergé de remords, je me questionne sérieusement sur la douleur ressentit par les carottes au moment de la cueillette et la souffrance de la pomme à l’instant de la torsade de la queue (houlà !). Il faudra bien s'en passer un jour, que je me dis. « Mais, argumentez-vous l’inquiétude dans la voix, si nous ne pouvons plus manger d’animaux, de légumes et de fruits, que mangerons nous ? Nous mourrons de faim ! ». Bien sûr que non. Nous mangeons du prochain depuis des siècles, il ne nous suffira que d’en mettre désormais officiellement au menu. Une pierre, deux coups. Bon appétit !

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