dimanche 29 janvier 2006

Relativité des couleurs

Imaginons que nous présentons un citron bien mûr devant un groupe et que nous demandions (au risque de paraître ridicule il va sans dire !) : « de quelle couleur est cet objet ? ». Réponse unanime et moqueuse : le citron est jaune. Mais admettons que nous voulions complexifier l’interrogation et que nous demandions de préciser cette réponse. Long silence et quelques rires nerveux suivis de ces réponses : « jaune pâle ? », « jaune foncé ? », « jaune serin ? », « jaune or ? ». Et le farceur d’ajouter : « jaune citron ? ». Personne ne pourra définir le qualificatif jaune autrement qu’en lui adjectivant un autre objet jaune ou en le situant par rapport à une autre couleur (« une sorte de beige brillant ? »). Un scientifique pourrait parler de la longueur d’onde du jaune, mais cette information n’ajouterait aucune précision quant à ce qu’est objectivement le jaune à nos yeux et surtout dans notre esprit. Qui sait si les couleurs qu’il perçoit sont les mêmes que les autres perçoivent ? Nous voyons tous le jaune, nous sommes évidemment capables de nommer des objets jaunes ou de les distinguer parmi d’autres objets qui ne le sont pas, mais il nous est objectivement impossible de nous assurer que le jaune du voisin et semblable au nôtre. Si nous nous entendons pour dire que tel objet est jaune, c’est uniquement parce qu’on nous a appris que cette impression sur la rétine, la longueur de cette onde brillamment décomposée par notre système visuel et analysée par notre cerveau à l’instant où on nous le montre, porte l’appellation jaune. Mais qui peut obtenir la certitude objective que le monde perçu par un autre n’a pas un ciel rouge, un soleil vert et une mer aux reflets orangés, dans sa perception des couleurs ?

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